Revenons à la situation présente. Aujourd'hui, avec le développement et la prédominance des rapports de production capitalistes en Chine, avec sa participation aux organisations impérialistes telles que l'OMC et son intégration au système impérialiste, sa position n'est guère différente de celle des puissances impérialistes. Quels que soient les désaccords qu'elle puisse avoir avec les États-Unis sur le « partage du butin », il existe une entente sur la question des droits des travailleurs, réduits pour le bien de l'économie de marché, et aussi contre les États dont les agissements rentrent en contradiction avec les intérêts des grands monopoles des puissances impérialistes.
Un exemple, l'attitude de la Chine concernant le programme nucléaire de l'Iran. Comme nous le savons, la Chine a développé une coopération économique étroite avec l'Iran, qui est un de ses principaux fournisseurs pétroliers. En dépit de cette coopération, en septembre 2010, la Chine, ainsi que la Russie, a fait bloc avec les États-Unis, la France, l'Allemagne et la Grande-Bretagne (« le groupe des 6 ») sur la question du programme nucléaire iranien, demandant que l'Iran fasse machine arrière et accepte les conditions du Conseil de sécurité de l'ONU concernant son programme nucléaire. Plus tôt, en juin 2010, la Chine a accepté au Conseil de sécurité de l'ONU de nouvelles sanctions contre ce pays.
Second exemple, sa position par rapport au Kosovo. Même si la Chine et d'autres puissances impérialistes n'ont pas encore reconnu officiellement le Kosovo, il est intéressant de noter, qu'au Conseil de sécurité de l'ONU, elle n'a pas adopté une position résolue et cohérente contre l'offensive de l'OTAN dans les Balkans, tandis qu'elle s'est abstenue sur l'opération de maintien de la paix, dans laquelle l'OTAN joue un rôle capital (la fameuse KFOR) et a participé par la suite à l'occupation en envoyant des forces de police.
En outre, en 2010, nous avons eu la décision ignominieuse du Tribunal international de la Haye, qui a statué que la déclaration d'indépendance du Kosovo n'était pas une violation du droit international. Certains juges ont tenu une position différente concernant cette décision très importante. Les juges de Russie, de Slovaquie, du Brésil et du Maroc ont statué contre la légitimisation du Kosovo, soutenue par les juges des États-Unis, du Japon, d'Allemagne, de France, de Grande-Bretagne, du Mexique, de Nouvelle-Zélande, du Sierra Leone, de Somalie et de Jordanie. Comme cela est mentionné dans les documents publiés, le juge chinois n'a pas pris part à cette décision qui vise à modifier les frontières dans les Balkans, ouvrant la « boîte de Pandore » et allumant de nouvelles querelles potentielles concernant les minorités nationales, sur des « questions procédurales ». Cela fut suivi par l'appel lancé par l'Albanie à Pékin pour reconnaître l'indépendance du Kosovo et pour user de son influence au Conseil de sécurité de l'ONU afin que les autres Etats-membres soutiennent sa reconnaissance.
Troisième exemple, la visite du premier ministre chinois, Wen Jiabao, en Grèce en octobre 2010. Dans son discours au parlement grec, le premier ministre chinois a affirmé que la Chine soutenait un Euro stable car« nous avons la conviction qu'une Europe forte et unie pourra jouer un rôle irremplaçable dans le développement du monde » et il a ajouté qu'il ressentait de la « joie quand il voyait la Chine s'éloigner de la brume de la dette étrangère, en réduisant son déficit et en s'ouvrant des perspectives de développement économique ». Dans ces deux phrases, le premier ministre chinois, membre du bureau politique du comité central du PC Chinois, a réussi à résumer le soutien des dirigeant de son pays au centre impérialiste européen qu'est l'UE et au gouvernement social-démocrate du PASOK qui, sous prétexte de réduction des déficits, mène un programme anti-populaire brutal afin de réduire le coût de la main d'œuvre en Grèce.
Les dirigeants chinois ont signé une série d'accords avec le gouvernement grec, qui constitueront une source de profits pour certaines fractions de la ploutocratie grecque. Les fameux 5 milliards d'investissement chinois ne sont rien d'autre qu'un coup de pouce pour les armateurs grecs, au service de l'industrie de construction navale chinoise, tout en poursuivant son but de continuer la pénétration du marché européen par la Grèce. La construction, l'utilisation et l'exploitation des ports et des lignes de chemin de fer, ainsi que des infrastructures de construction de navale, par les monopoles chinois et certaines entreprises grecques renforceront encore le développement inégal aux dépens des besoins du peuple.
L’expansion et le renforcement de l'activité du capital dans ces infrastructures essentielles, en lien avec les politiques anti-populaires, ont conduit à appauvrir les travailleurs, en réduisant leur salaires et leurs droits sociaux. Les exportations d'huile d'olive ne profiteront qu'aux gros capitalistes qui les contrôlent et non aux petits exploitants, dont la position ne cesse de se dégrader. Néanmoins, cette visite a été utilisée par le gouvernement « social-démocrate » du PASOK en vue de faire croire aux couches populaires du pays que grâce aux investissement chinois (ou ceux du Qatar, d’Israël, etc.), il y aurait développement et que par conséquent le PIB connaîtrait une croissance et que des miettes tomberaient pour le peuple, de la table des capitalistes. En réalité, nous parlons naturellement d'une perspective d'issue capitaliste à la crise qui ne fera pas obstacle au développement en faveur du grand capital, ni à la pauvreté et au chômage du peuple. Nous parlons d'un développement qui casse les capacités productives de notre pays et l'engage dans de dangereuses rivalités impérialistes. En tout cas, on ne peut certainement pas parle de la « contribution internationaliste » de la Chine à la lutte du peuple grec.
Enfin, le Parti communiste de Chine peut bien pour le moment maintenir son titre de « parti communiste », néanmoins nous savons qu'il a développé des liens très étroits avec l'Internationale socialiste. En 2009, le PCC a organisé en Pékin un séminaire commun avec l'Internationale socialiste, avec comme sujet « un modèle de développement différent : l'économie verte ». Dans son discours sur place, le président du PASOK et de l'Internationale socialiste, G.Papandreou a exprimé le « désir de l'Internationale de renforcer encore les relations entre les deux camps, ce qu'a démontré le séminaire d'aujourd'hui ». La question d'une « coopération plus large dans le cadre de l'Internationale socialiste » a également été mise à la discussion lors de la rencontre entre le PASOK et le PCC en juillet 2010.
En 2009, le livre « la Chine n'est pas satisfaite » (42) qui traite de la position de la Chine dans le monde a été publié en Chine (700 000 copies ont été vendues en trois mois, et des millions encore après). Parmi les éléments que l'on retrouve dans l'ouvrage :
« Nous sommes les personnes les plus à même de prendre la direction du monde » Puisque, c'est l'argument, la Chine gère les ressources naturelles mondiales de façon plus efficace que tout autre pays, il doit prendre la tête du monde. Il y est noté également que l'armée chinoise doit défendre la souveraineté du pays hors des frontières, directement dans les pays où la Chine a des « intérêts vitaux » à défendre. (43) Il propose la mobilisation de l'armée chinoise dans les espaces où le capital chinois est actif. Nous devons nous rappeler que la Chine joue un rôle actif dans la « guerre contre la piraterie » (dans la « Déclaration commune » signée entre le gouvernement grec et la Chine lors de la récente visite du premier ministre chinois en Grèce, le gouvernement grec a remercié la Chine pour la protection par la Marine chinoise de navires grecs dans les eaux somaliennes), tentant de contrôler d'important lieux de passages maritimes internationaux.
Dans le livre sus-mentionné, il y a une discussion sur le « besoin d'un espace vital » pour la Chine, et les regards sont tournés vers les vastes étendues de Sibérie qui « doivent être cultivées par le grand peuple chinois ».
Cela va sans dire qu'un tel livre n'a pu être publié en Chine aujourd'hui sans l'approbation du PCC. Pour ceux qui en doutent encore, il suffit de lire l'organe du PCC, le « Quotidien du peuple », qui écrit : « Apparemment, la Chine est prête à placer le Far East Russe sous son influence, mais de façon à ne pas alarmer Moscou. La force de cette influence reposera non pas sur une immigration à grande échelle de colons chinois, mais sur la « sinisation » des Russes (…) Un beau jour, il y aura une crise sérieuse et, au vu de l'influence politique et militaire déclinante de Moscou, ces Russes pourront se tourner vers Pékin et non vers leur propre gouvernement. Dans cette situation potentielle, le Far East Russe pourra devenir une province de la Chine ».
Dans la même veine, on doit se souvenir qu'en août 2010 le représentant du Ministère de la Défense du Vietnam, Nguen Fwong Nga, a publié la déclaration suivante : « Le Vietnam exige que la Chine cesse immédiatement ses violations de la souveraineté du Vietnam » (47) Dans la mer de Chine méridionale, où il y a des réserves énergétiques, des « zones grises » ont émergé et des régions où la souveraineté est disputée.
Bien entendu, dans le cadre de cette compétition, émergent également à la fois des « axes » de coopération et des « anti-axes ». Nous pouvons ainsi voir le premier ministre italien Berlusconi, qui traite habituellement tout opposant politique de l'accusation gravissime de « communiste », n'avoir aucun problème à éclairer le Colisée à Rome de la couleur rouge des « communistes » afin d'honorer le premier ministre chinois qui a visité la « ville éternelle » avec comme objectif de doubler le commerce entre les deux pays pour atteindre les 100 milliards de dollars d'ici 2015, tout en participant au « développement des ports et d'autres investissements », en suivant une politique visant à faire de l'Italie une « porte d'entrée » en Europe (48).